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jeudi 20 avril 2017

Pourquoi voter ? Voter pour quoi ? S01E02


 Dédé -
On est relativement en phase, mais ce qu'il me manque, pour savoir quoi voter, est de pouvoir faire une projection de la France avec chaque candidat. Je ne suis pas capable d'imaginer ce qui pourrait se passer. Est-il nécessaire de ne pas trop pénaliser, voire avantager encore un peu plus les entreprises pour que notre pays reste compétitif ? Est-il nécessaire que notre pays soit compétitif ? La France a-t-elle réellement besoin de l'Europe, de l'euro ? Que se passera-t-il sinon ? Et voilà, ça me saoule, comme à chaque fois. Je n'ai aucune réponse à toutes ces questions. Quand j'essaye de me renseigner, je ne suis jamais vraiment contre un argument, qu'il soit de droite ou de gauche, encore moins du centre. Je pense que mon manque d'intérêt à mené à mon inculture politique, et du coup je suis neutre, indécis, voire agnostique.
J'ai en tête les synthèses que tu fais des candidats les plus connus, mais c'est complètement insuffisant pour me faire un avis et faire un vrai choix.

Dreuff - 
Alors, je n'ai pas de réponse définitive à toutes tes questions, je n'ai que des éléments de réponse, et pire ce ne sont que les miens glanés au fur et à mesure de mes lectures, recherches et analyses.

Aider les entreprises à devenir plus compétitives ? La compétitivité de la France...
Bien sûr que la question est complexe. Il est nécessaire que l'économie soit vivante et dynamique mais dans quel but ? Prenons les choses à la base, plus les entreprises sont florissantes, plus elles ont besoin de main d'oeuvre et de ressources et donc cela fait mécaniquement baisser le chômage, qui implique une hausse de la consommation et ainsi cela augmente l'activité et la richesse des entreprises. C'est cette spirale vers le haut qui est recherchée et à cela personne n'a rien à dire. C'est d'autant plus vertueux que l'effet indirect de tout cela est que cela augmente l'assiette d'imposition et donc les capacités d'action de l'état. Mais la réalité est moins simple.
En effet, si les besoins de main d'oeuvre et des ressources supplémentaires sont remplis à l'extérieur alors seule la marge de l'entreprise augmente mais cela n'a pas d'effet global positif sur l'économie du pays. Et si de plus, cette marge n'est pas réinvestie en France mais au pire dans un compte aux îles Caïman, on a tout faux, sur toute la ligne.
A tâches égales, je ne pourrais jamais être compétitif avec un ingénieur sénégalais ou indien qui coûte 2, 3, voire 5 fois moins que moi. La solution est-elle de me faire travailler plus ? de me payer moins ? Ou bien développer mes compétences spécifiques qui font que certains travaux ne peuvent pas être délocalisés ?
On nous donne souvent les exemples allemands et anglais comme référence de ce qu'il faut faire pour réactiver l'économie. 
Notre voisin germanique n'offre pas de bonnes conditions aux couples pour avoir des enfants. Quand une femme a un enfant, elle est quasiment contrainte de s'arrêter de travailler, elle libère un poste et cela fait baisser le chômage. Sauf que, de ce fait le taux de natalité est l'un des plus faibles d'Europe. Le manque de main d'oeuvre est tellement problématique qu'elle a contraint le gouvernement à autoriser la venue d'un million de migrants. Il n'y a aucune visée humanitaire dans ce geste, juste un besoin économique. Mais intégrer un million d'étrangers d'un coup ne se fait pas sans heurts, et le racisme et les extrémismes augmentent de façon alarmante.
Pour le Royaume-Uni, le chômage a baissé à coups de contrats zéro heure : une merveille que ce truc là. Tu signes un contrat zéro heure, tu dois être à disposition exclusive de ton employeur, il t'appelle, tu bosses, tu es payé, il ne t'appelle pas, tu ne bosses pas, tu n'as rien. Cette abomination est pour moi une usine à créer de la pauvreté.

Voilà un point important pour moi, on nous parle beaucoup des chiffres du chômage, mais on nous parle moins des travailleurs pauvres qui occupent des postes en interim ou en CDD en tout cas précaire à temps partiel. Donner un travail à quelqu'un c'est lui redonner sa dignité dit-on, mais pas si cela ne lui permet pas des conditions de vie dignes à mon avis. 

L'Euro, et l'Europe
Les gens sentent bien qu'il y a un problème, que l'Etat a perdu de son poids, de son influence, de son pouvoir. Le bouc émissaire tout trouvé est l'Europe. Je te le dis comme je le pense, sortons de l'Europe et nous constaterons que nous aurons le même sentiment. Le politique est en train de perdre la bataille face à l'économique et au financier. Il est là le vrai pouvoir, pas dans la communauté européenne.
L'Europe, elle nous protège. Sans, tous les créanciers de notre dette nous seraient tombés dessus et nous auraient poussés à la faillite. Serait-ce la solution ? Peut-être, mais en Grèce, qui a pourtant évité la faillite, les revenus des fonctionnaires, des retraités ont quasiment perdu 1/3 de leur valeur, la moitié des entreprises a disparu. C'est là un avenir souhaitable ? Nous relèverions-nous ? en combien de temps ? et avec quels dégâts au passage ?

Non, l'Europe n'est pas parfaite, loin s'en faut. A moi aussi, elle me mets les abeilles. Mais il ne faut pas oublier que nous ne sommes plus la puissance coloniale qui possède 1/10 des terres émergées comme c'était le cas auparavant, nous sommes un petit pays de 65 millions d'habitants. L'Europe est la première puissance économique, même si j'en conviens et le réclame, elle doit apprendre à se faire respecter comme tel.

Dédé - 
Des questions comme celles auxquelles tu as répondu, j'en ai une sacrée liste. c'est le problème.
Mais concernant l'Europe, je suis d'accord que ça paraît très con d'en sortir une fois qu'on a choisi d'y aller. Mais merci aux anglais de tenter l'expérience, on va voir ce que ça donne.
Pour les entreprises, ça me paraît toujours compliqué de leur permettre d'être compétitives sans les pénaliser au risque de les faire fuir, et leurs investissements avec. Cela nous ramène au problème que l'Etat se sert absolument partout : les taxes, les impôts, les charges patronales et j'en passe. Oh ! ça y est, je commence à avoir des idées, ça fait des frissons BRRRR !
Si l'Etat utilise mieux ses milliards et qu'il baisse ses ponctions à tout va tout en maîtrisant les fuites fiscales et le travail illégal, ça soulage les entreprises qui peuvent réinvestir plus, voire augmenter les salaires ou tout du moins embaucher, donc le pouvoir d'achat augmente et tout le monde y gagne, non ? Je réfléchis tout haut, mais bon....
Tu vas peut-être me dire que l'Etat veut bien baisser ses ponctions à condition qu'il y ait de la croissance. Mais ça veut dire quoi une croissance de 1%, pourquoi tout le monde s'accroche à un chiffre aussi ridicule. Il est valable au moins cet indicateur ? Quelqu'un a pensé à vérifier ça ? Quoi Michel, il est bidon ? Putain les gars, faites chier ! J'comprends mieux pourquoi on tourne en rond, maintenant ! Ca nous renvoie à quelle constitution cette connerie ?
Ou alors, l'Etat doit dépenser moins. Et oui, un milliardaire reste milliardaire parce qu'il s'arrange pour gagner plus que ce qu'il dépense.
En fait, l'Etat c'est comme un marseillais qui gagne au loto tous les ans, il claque tout à chaque fois, anculé !

Dreuff -
Je vois deux sujets dans ta dernière réponse : les impôts et le PIB (et tout ce qui suit : croissance, décroissance, ...)

Commençons par les impôts. Baisser les impôts est le leitmotiv de droite, ça c'est tout à fait certain, une sorte de réponse magique à tous les maux de la France. Le scénario que tu présentes est effectivement tentant. Baisser les impôts et permettre aux entreprises d'investir pour entrer dans un cercle vertueux. 
Et dans la vraie vie, ça donne quoi ?  Figure toi que c'est ce qui a été fait par le gouvernement Hollande. Cela s'appelait le CICE dans le cadre du pacte de responsabilité. Coût pour l'état entre 15 et 20 Mds € par an. On en attendait une réduction du chômage à hauteur de 1 millions de personnes.... résultat Nibe, Nada, Niente... Le CICE a contribué à reconstruire les marges et donc à engraisser les méchants actionnaires. 
De manière plus générale, je suis convaincu que même à diviser par 2, 3, 5 ou 10, on trouverait encore des gens qui jugeraient les impôts excessifs. Le taux d'imposition le plus haut d'Europe est au Danemark. Il se trouve par ailleurs que c'est l'un des pays au monde dans lequel la population se sent la plus heureuse et épanouie, le système scolaire y est excellent...
Je prends un autre exemple, Total il y a quelques années (quand le pétrole était au plus haut) a fait près de 4 Milliards d'€ de marge mais a payé 0 € d'impôts en France. La classe, non ?
Une boite qui va mal, est-ce à cause des charges ou bien parce que le modèle économique est mauvais ? Des boites en France qui sont ultra performantes, il en existe énormément, elles travaillent avec les mêmes charges et dans le même contexte mondialisé que les autres ( Airbus, Sanofi, Chanel, Carrefour, les grosses banques,.................).
Tout ça pour dire que ce que je crains c'est que focaliser sur les impôts ou les charges soit un prétexte ou une mauvaise excuse.
Il est donc très délicat de généraliser, des exemples peuvent être trouvés dans les deux sens.
Ce qui est certain, c'est que l'Etat possède des marges pour mieux utiliser l'argent public. C'est une évidence, que tout n'a pas été fait encore en matière de simplification et d'optimisation. Là, je suis parfaitement d'accord avec toi.
Pour terminer sur le sujet, parce que je suis capable d'écrire pendant des heures sur les impôts, je vais te citer Joseph Stiglitz, prix Nobel d'économie, reçu en son temps à l'Elysée par Sarko. Il explique dans un de ses bouquins que l'un des rôles de l'Etat est de redistribuer la richesse. En fonction de où et comment il pose 1 €, il va générer entre 0,5€ et 1,8 € de PIB. En gros, tu donnes 1 € à un riche, il va l'épargner (au mieux en France, au pire ailleurs) parce qu'il n'en a pas besoin tout de suite. Tu donnes 1 € à un pauvre, l'argent va tout de suite circuler dans l'économie. En étant caricatural, il va s'acheter une baguette, et le boulanger va utiliser cet argent pour faire d'autres achats, etc...
Je passe donc (pour le moment au moins) les notions de devoir moral du paiement des impôts, du fait de rendre à la France tout ce qu'elle nous a offert (une vie dans un pays en paix, une éducation, des soins de santé, un culture à portée de main, ... ) ...

Donc le PIB, j'ai tenté plusieurs fois d'écrire sur le sujet mais pour résumer c'est simple il me fout les abeilles et ce pour plusieurs raisons. 
La première est qu'il est l'alpha et l'oméga, tout est désespérément fait pour qu'il augmente ( la fameuse croissance) et quand ce n'est pas le cas c'est la cata. Il a été théorisé ( Si on n'a pas X% de croissance, on n'a pas de réduction du chômage, ....), à tel point que je me demande dans quelle mesure on n'est pas rentré dans un contexte de l'expérience du chat de Schrödinger.
Petit rappel : Schrödinger pour illustrer la difficulté de certaines expérimentations a inventé cette expérience qui n'est que théorique. Imaginons un chat dans une capsule opaque, si on ouvre cette capsule, l'animal meurt. Dans de telles conditions, on ne peut jamais savoir si le chat est toujours en vie ou décédé. Ce qu'il voulait dire c'est que dans certaines conditions, observer un phénomène a une influence directe sur celui-ci et donc interdit une observation objective.
Je crois que quand on dit que le PIB est en croissance à un endroit, on attire les intérêts d'investisseurs et donc que le PIB ne s'en trouve encore renforcé, et inversement. Donc observer le PIB et sa croissance n'est pas objectif.

La seconde raison est que sa mesure me paraît très éloignée de la mesure de la santé d'un pays, et même de sa santé économique. Garantit-il que toutes les richesses sont produites et profitent à une minorité ? Non, et pourtant une telle situation peut être viable un moment mais pas sur le long terme. Et que dire d'efforts de recherche, de santé, et ou d'enseignement, ils sont à fond perdus vis à vis du simple PIB et pourtant ils garantissent la richesse future.

Enfin, la dernière raison est que j'ai bien du mal à comprendre comment il est calculé et de là je doute assez fortement de son exactitude. Prenons juste un exemple. Je dois faire un trajet Lyon-Paris. Si je le fais en train, je vais payer disons 100 € (ça va rentrer dans les chiffres de la SNCF donc dans le PIB) , si je le fais en blablacar, je vais payer environ 35 €, comment ça rentre dans le PIB, ça ? Et les monnaies locales, comment ils l'intègrent dans le PIB, ça ? et le bon coin ? Toute l'économie locale et de proximité, toute l'économie circulaire, comment elle rentre dans le PIB.

En somme, le PIB est pour malsain, théorique et inexact. Il est plus que temps de travailler à un autre indicateur qui puisse diriger nos politiques publiques.

Dédé - 
Ah, donc Michel avait raison, la croissance c'est bidon ! (LOL)
Cela m'éclaire un peu plus, mais j'ai toujours le même sentiment. Les gouvernements successifs limitent les dégâts, mais on est dans une spirale infernale et on ne maîtrise absolument rien. Et on s'approche inexorablement (j'adore ce mot;)) de l'horizon des événements (référence aux trous noirs).
Donc, selon toi, il faut quand même voter pour le moins pire des candidats qui partage quelques idées avec toi.
J'ai regardé le match avec les 11 joueurs l'autre jour et... je n'ai pas vu le ballon, bien qu'il y ait eu des prolongations (LOL).
Plus sérieusement, ce qui me paraît constant, c'est que tous les candidats annoncent leurs mesures mais ils n'expliquent pas pourquoi et surtout comment les mesures s'insèrent dans leur stratégie. Bon, ce n'était pas possible car le débat était cadencé par des questions orientées et avec un temps limité. Un débat télévisé ne sert donc qu'à faire de l'audience, rien de plus. Enfin, le débat du deuxième a plus de sens, selon moi.
Mais, en tout cas, tu as réussi à me motiver à lire les tous les programmes cette année juste pour voir si des stratégies sont proposées. Et si j'arrive à faire un choix, tant mieux, je mettrai quelque chose dans l'enveloppe !

Dédé, va-t-il trouver un candidat qui va lui plaire suffisamment ? C'est sur ce suspense insoutenable, que nous nous laissons pour ce deuxième épisode.. à suivre

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